Johann Chapoutot, Les nazis et la « nature », 2012

Protection ou prédation ?

Rampe de lancement mobile d’une fusée A4

Défenseurs et protecteurs de la nature, les nazis, vraiment ? Dans cet article, Johann Chapoutot montre qu’il s’agit davantage pour eux d’en user comme d’une métaphore. Dans le syntagme Blut und Boden, c’est bien le sang, et donc la race, qui priment sur un sol dès lors instrumentalisé, exploité et défiguré. Spoliation et exploitation, prédation et déprédation de la nature triomphent ainsi, bien loin de toute culture d’un environnement à préserver.

 

Que pèse Tchernobyl face à Auschwitz ? Face à la montée de la sensibilité et des mouvements écologistes en Occident, une riposte politique et idéologique a tiré argument de la radicalité du propos « vert » pour y déceler une nuance de « brun ». En France, c’est depuis vingt ans qu’un procès en nazisme est mené à l’écologie, mi-sérieux, mi-amusé, sur le mode de la boutade (quel végétarien ignore qu’il partage cette pratique avec Hitler ?) ou de l’incrimination plus argumentée.

Moderne et humaniste autoproclamé, Luc Ferry a publié un essai sur Le Nouvel Ordre écologique (1992), comme il y avait eu, jadis, un « nouvel ordre européen », dans lequel il s’inquiète de ce « romantisme intellectuel » que représente la pensée écologique. Les anti-Lumières sont de retour, sous l’espèce barbue et bonhomme des militants du Larzac, comme, hier, sous la forme moins amène des SA amoureux de la nature, du sol et du sang. Face à ce retour d’une barbarie tout aussi misanthrope qu’elle est plancto- et zoophile, il faut remettre l’homme au centre du monde et faire confiance, sinon à sa bonté, du moins à sa perfectibilité et à sa bonne volonté : il ne faut pas faire aussi vite le deuil du progrès par la science et la technique, au prétexte des regrettables abus et accidents que certains excès en ont engendrés. Contre les éternels Rousseau et leur pessimisme culturel, il faut relever l’oriflamme des Lumières et de leur optimisme renouvelé, qu’encourage, par effet de retour, le succès des thèses écologistes [1].

La reductio ad hitlerum, argument disqualifiant toujours bienvenu, s’est donc diffusée, dans le cas de la sensibilité écologiste, avec toute la force ironique d’un paradoxe qui pourrait, au fond, être bigrement sérieux. Car si les amis des bêtes sont crucifiés dans les dîners en ville par le rappel dirimant que le Führer adorait son chien, les protecteurs de la nature se voient opposer le Reichsnaturgesetz de 1935, sur le mode d’une insinuation (« c’est curieux, non ? ») qui ouvre la voie à une démonstration d’autant plus implacable qu’elle semble frappée au coin du bon sens : les nazis ont été les premiers à promulguer une législation en pointe dans le domaine de la protection de la nature, et il n’y a rien d’étonnant à cela, tant la haine des hommes dont ils ont témoigné fait bon ménage avec la sacralisation du monde non humain, l’amour immodéré des paysages pittoresques, des cours d’eau et des hamsters. Quand les plus insistants formulent une critique génétique du discours écologique (le vert dérive du brun), les plus insidieux se contentent de suggérer une critique analogique, en soulignant que les congruences entre le vert et le brun donnent à penser. Les arguments semblent être nombreux, qui soutiennent cette démarche critique : tant par leurs actes (les législations de protection de la nature) que par leur culture (l’exaltation du sol, de l’entité rurale et de l’identité paysanne), les nazis semblent bien avoir été des antimodernes naturophiles et nostalgiques qui en annoncent d’autres.

Qu’y a-t-il de vert, cependant, dans la culture brune ? Et comment les nazis eussent-ils pu faire preuve de sensibilité à l’environnement, quand aucun mot n’était disponible pour la concevoir et la formuler ? Le mot Umwelt (environnement) prend en Allemagne ses contours actuels dans les années 1970. Dans le dictionnaire Brockhaus de 1938, il reste confiné à son usage technique, en sciences naturelles, comme équivalent de biotope, et demeure parfaitement absent du discours nazi ; quant au composé Umweltschutz (protection de l’environnement), l’on n’en trouve pas trace dans les colonnes du thesaurus. Le mot Natur, lui, existe bien, de même que Naturschutz (protection de la nature). Natur est cependant définie par le Brockhaus comme étant « la campagne, composée de forêts et de champs » [2], et n’a rien d’une nature virginale, primale, préservée de toute occupation ou activité humaine. Quant à la « protection de la nature », si le dictionnaire mentionne bien les « mesures pour protéger la faune et la flore », ainsi que les « monuments naturels », il précise que cette protection s’étend aux « paysages » [3], fussent-ils anthropisés. C’est que, dans l’Allemagne des années 1930, le Naturschutz ne se distingue pas du Heimatschutz, de la préservation des territoires et de leur culture. La Heimat, c’est le pays où « l’on se sent chez soi », la petite patrie qui constitue le cadre hérité et naturel de la croissance d’un individu. Le Heimatschutz est « un mouvement qui se préoccupe de la préservation des caractères propres d’un pays, naturels comme culturels […] en tant qu’ils sont le fondement et l’expression de l’être humain. Le Heimatschutz protège la culture locale dans ses us, sa langue et ses chants » [4].

Notre conception de l’environnement comme système dans lequel l’homme intervient à titre de paramètre modifiant ou perturbateur est donc absente des préoccupations des nazis et de ceux qui les précèdent : les militants des associations de Natur- und Heimatschutz, si nombreuses en Allemagne depuis le dernier quart du XIXe siècle [5], ne pensent pas la distinction entre une nature en soi et une nature anthropisée – de même que, chez les géographes allemands de l’époque, si attachés à la notion de Landschaft (paysage), l’attention porte sur la Kulturlandschaft (le pâturage bavarois, le bocage du nord, etc.) plus que sur la Naturlandschaft (la steppe, la lande, etc.) : c’est le paysage auquel le Volk (peuple) a imprimé sa marque et par lequel il exprime son être, plus que la vierge solitude qui est objet d’étude. Par ailleurs, l’association des deux termes Heimat et Natur montre que la volonté de préservation est locale et non globale : les Landschaften des États-Unis ou du pays basque peuvent bien disparaître, peu importe. L’idée d’un impératif de préservation universel, ou celle d’une solidarité et d’une indépendance des phénomènes naturels et de leur perturbation à l’échelle du monde, est radicalement absente.

Race et nature

Il reste que le nazisme défend une conception de la « race » germanique présentée comme naturgebunden, naturnah, i.e. proche de la nature, liée à elle. L’indigénisme nazi (la race est, au sens propre du mot « indigène », issue de là) fait parfois bon ménage avec une affirmation d’autochtonie [6] : issue de sa terre, n’ayant jamais quitté son sol que pour aller civiliser d’autres terres, la race germanique ne peut, malgré les aliénations culturelles et biologiques successives, être rendue à elle-même qu’en retrouvant la prime pureté de sa naissance, c’est-à-dire de sa nature. La race germanique est issue d’une nature dont elle participe, et avec laquelle elle a vécu en communion, dans une proximité pratique (le travail de la terre), esthétique et éthique (le libre développement du corps, exposé, dans sa nudité, aux éléments et au soleil).

La promotion du ruralisme et (plus dans le discours qu’en pratique) du nudisme sont des voies d’accès à cette authenticité retrouvée : le nudisme et l’amour du corps doivent rompre avec des siècles d’aliénation chrétienne ; le ruralisme doit permettre (contre un siècle d’exode rural) de restituer le sang à sa terre. Le syntagme Blut und Boden est tellement réitéré sous le Troisième Reich que les deux termes en deviennent indissociables, si ce n’est synonymes : le sang, c’est le sol, et vice-versa. Cette formule tient lieu de slogan et de programme politique pour le ministre de l’Agriculture Richard Walther Darré. Cet ingénieur agronome, qui rencontre Hitler en 1930, devient Reichsbauernführer en 1933, après avoir fondé en 1931 l’Office central de la race et de la colonisation de la SS (RuSHA). Chantre de la paysannerie, éternelle source de vertu et de renouvellement biologique, Darré estime que les paysans sont « la source de vie de la race nordique » et écrit, dans une formule saisissante, que « le sang du peuple germanique jaillit de ses fermes » [7]. Soucieux, dans un monde où tout est devenu mobile (exode rural, circulation des biens et de la valeur), de fixer les Allemands à leur terre, Darré est le père de la loi de 1933 qui crée un Erbhof (exploitation patrimoniale), indivisible à la succession, inaliénable et non hypothécable (toutes dispositions qui suscitent les critiques du monde paysan).

Si l’expression « sang et sol » semble offrir des arguments à ceux qui ont voulu voir en Darré un nazi vert [8], un examen plus approfondi montre que, en termes discursifs comme pratiques, il n’en est rien. Dans Blut und Boden, c’est bien le sang qui prime, dans l’ordre de la phrase comme dans celui des priorités. Le sang est ce qui doit être encouragé, protégé et nourri par le sol, c’est-à-dire la terre en tant qu’elle est mise en culture et exploitée pour servir la race. La « terre » n’est jamais un absolu ; elle est toujours considérée relativement à ce peuple qu’elle doit servir et nourrir. C’est bien ce qui ressort de nombreux discours où Hitler se plaint de l’âpre pauvreté de la « nature » qui a échu aux Allemands, topos de sa peinture sans cesse reprise d’un Volk ohne Raum (peuple sans terre), insuffisamment doté et privé des moyens d’exercer son Lebensrecht, son droit à la vie. Ainsi de cette interpellation du président américain Franklin D. Roosevelt, lors d’un discours au Reichstag, le 23 avril 1939 :

« Vous avez la chance de ne devoir nourrir que quinze hommes au kilomètre carré dans votre pays. Vous disposez des richesses naturelles les plus infinies au monde. Par les dimensions de votre espace et par la fertilité de votre sol, vous pouvez offrir à chaque Américain dix fois plus de nourriture qu’il n’est possible de le faire en Allemagne. La nature, du moins, vous l’a permis. » [9]

L’humeur du Führer à l’égard d’une nature allemande insuffisamment généreuse est un argument de politique internationale, mais elle n’est pas feinte. Dans ses propos privés, Hitler ne se prive pas de dire que la race germanique a été chichement dotée : « De la pluie tout le temps, toute la région transformée en marécage […]. Ce pays était froid, humide et brumeux. » En somme, c’était « un pays de chien », avant que n’interviennent quelques heureuses mutations climatiques et, surtout, des travaux d’aménagement considérables [10].

On ne trouve donc aucune mystique de la « terre » ou de la « nature » en soi : le sol est adjoint au sang dans la stricte mesure où il peut le nourrir. Ce sol, par ailleurs, n’est rien par lui-même : travaillé par des générations de paysans germaniques, nourri et fertilisé par les morts portés en terre, il est tellement anthropisé que ce n’est, au fond, que par la race elle-même qu’il est devenu essentiellement allemand. Un extrait du film Heimkehr (1941) le montre de manière saisissante, au moment où l’héroïne Marie chante en ces termes le bonheur du retour au pays pour les paysans de la Pologne occupée par les Soviétiques :

« Ce n’est pas seulement le village entier qui sera allemand, mais tout autour, tout sera allemand […]. Ça nous fera tout drôle, que la terre des champs, le morceau d’argile, la pierre, l’herbe, le foin, les noisettes, les arbres, que tout cela soit allemand comme nous, parce que ça aura poussé sur les millions de cœurs des Allemands, tous ceux qui sont entrés en terre et qui sont devenus de la terre allemande. Parce que nous ne nous contentons pas de vivre une vie allemande : nous mourrons une mort allemande, et, morts, nous restons allemands, nous devenons un morceau d’Allemagne. »

La terre et les morts, pour les nazis, c’est donc une terre grosse des morts, une terre soumise à une véritable transsubstantiation par les vivants qui la cultivent et par les morts qui la fertilisent.

De la race comme arbre, comme forêt et comme champ

Que le sang prime sur le sol, que la race ait préséance sur la nature est bien exprimé par les nombreuses métaphores qui, dans le discours nazi, font intervenir la « nature ». Il est vrai que les nazis conçoivent le peuple (Volk, Rasse), non pas comme un artéfact, une construction culturelle (ils répudient cette vision, issue selon eux de la Révolution française), mais comme une entité naturelle, comme un organisme vivant doté de sa cohérence, défini par son intégrité et sa solidarité interne, et régi par la nécessité naturelle. Pour faire comprendre cette vision de la « communauté du peuple », les nazis recourent à des métaphores nombreuses : le corps (humain), l’arbre, le champ, la forêt, etc. Ces métaphores permettent de promouvoir des idées simples : on ne retire pas un membre du corps, on ne greffe pas de membre étranger, on taille les arbres, on sarcle le champ en en éliminant les mauvaises herbes, etc. La fermeture de la communauté, tout comme l’eugénisme auquel elle est soumise sont promus par ce registre métaphorique qui prétend plier un groupe humain aux lois de la nécessité naturelle. Doit-on y voir un indice supplémentaire de l’amour supposé des nazis pour la nature ? N’est-il pas significatif de voir la race assimilée à un arbre ou à une forêt ? Un film réalisé par les services de Rosenberg, en 1936, identifie le peuple allemand à sa forêt, cette forêt dont il provient. Ewiger Wald, ewiges Volk (forêt éternelle, peuple éternel) lie l’éternité de l’un à celle de l’autre, et noue les deux destins : mêlant le péplum au documentaire folklorique, le film montre des légions romaines prises au piège d’une forêt germanique dont les arbres eux-mêmes les combattent, en s’abattant sur eux [11]. L’assimilation est totale, mais de quoi parle la métaphore organiciste, forestière ou arboriste ? Lisons, entre mille exemples, cet extrait d’une publication SS :

« Il contrevient à la volonté de la nature que l’homme, aveuglé par l’illusion de sa propre importance, cherche à diriger son existence selon son bon vouloir […]. L’observation de la nature nous enseigne que la feuille n’existe que par la branche où elle pousse ; que la branche reçoit sa vie du tronc et que ce dernier dépend des racines, qui reçoivent leur force du sol. L’arbre, à son tour, n’est qu’un membre de la forêt. » [12]

Voici, en termes arbori- ou sylvicoles, une autre version, très didactique, du slogan nazi « Tu n’es rien, ton peuple est tout ». La pédagogie holistique emprunte la voie de l’assimilation aux organismes naturels pour expliquer la nature des rapports entre le tout (arbre = peuple) et la partie (individu = feuille). Quand, toutefois, on parle de la race comme d’un arbre, on parle de la race plus que de l’arbre : le référent est toujours la race, seule entité biologique qui importe.

Remarquons par ailleurs que la « nature » apparaît dans le discours nazi avant tout comme une instance législatrice, celle qui, sans même les avoir édictées, impose ses « lois naturelles » (distinction et hiérarchie des races, dégénérescence du sang-mêlé, survie du meilleur, pour peu qu’il ait su protéger l’excellence de son sang, etc.). Bien loin d’apparaître sous un jour sympathique ou amical, la nature est, dans le discours nazi, coercitive : ses lois sont nécessaires, et tout manquement à les respecter aboutit à la dégénérescence et à la mort. Par ailleurs, la nature relève plus de l’agonistique que du bucolique : c’est la nature qui a distingué les races et qui les a plongées dans une guerre sans merci.

La main de l’homme doit se prêter aux desseins de la nature, pour éviter tout obstacle à ses processus : les êtres incapables de vivre et de combattre ne peuvent bénéficier des effets contre-sélectifs des sociétés modernes qui laissent subsister le malade et l’impotent. Pour faire accepter des mesures qui heurtent quelques siècles d’héritage chrétien et d’acculturation morale, la métaphore horticole s’impose : « Quiconque abandonne à elles-mêmes les plantes d’un jardin, écrit Darré, constatera à son grand désarroi qu’en fort peu de temps toutes les plantations sont envahies de mauvaises herbes. » Il est donc nécessaire qu’intervienne « l’action créatrice et volontaire du jardinier qui encourage de sa main […] ce qui doit être encouragé et qui éradique ce qui doit être éradiqué […]. Voilà, transposé à la race, le sens de notre ancienne législation germanique qui […] créait les conditions d’existence de la germanité » [13]. L’eugénisme est donc aussi simple et logique que du jardinage : les métaphores arboricoles, sylvicoles et agricoles servent le même dessein pédagogique. Le « -cole » de nos adjectifs indique bien qu’il s’agit plus de culture (des arbres, des forêts, des champs, des jardins) que de simple nature : l’homme est acteur et impose à une matière naturelle sa « gestaltender Wille » [14], sa volonté formatrice, ce qui va lui donner la Gestalt (forme) désirée.

Partout où il est question de nature, il est donc question de la race : les métaphores naturalistes qui saturent le discours nazi ont pour vocation d’enseigner ce qu’il est bon de faire pour soigner et aguerrir le peuple, et le sol n’est valorisé qu’en tant qu’il produit pour nourrir le peuple allemand.

La loi de 1935 et le Plan quadriennal de 1936

En termes de pratiques, des travaux récents montrent que ce rapport nazi à la nature n’est pas resté lettre morte, contrairement, d’ailleurs, à la législation protectrice prise en 1935. Il apparaît tout d’abord que la loi de 1935 n’a rien de spécifiquement nazi, puisqu’elle reprend les principales dispositions d’un projet de loi examiné au Reichstag, mais non adopté, en 1927, sous Weimar [15]. Déçus par les palinodies d’un parlementarisme trop complexe pour être volontariste, les militants du Naturschutz allemand ont accueilli le mouvement nazi, son exaltation du paysan et des paysages, comme une aubaine, et ont œuvré au succès de leur projet dans le cadre du nouveau régime. Dans la pratique, toutefois, la loi n’a prévu d’affecter aucun fonctionnaire à sa mise en œuvre : la protection de la nature et des paysages devait impliquer des militants de la cause, bénévoles et non titulaires. Par ailleurs, la centralisation (inédite en Allemagne) imposée par les nazis a éloigné les décisions des terrains, rendant impossible une régulation fine et une gestion proche et efficace des dossiers locaux [16]. Adoptée en 1935, cette loi semble en outre être un (bien précoce) chant du cygne : l’année 1936 marque en effet le début du Plan de quatre ans qui doit rendre l’Allemagne parfaitement autarcique et apte à mener une guerre longue. Dès lors, les quotas sylvicoles et agricoles explosent : Hermann Goering, responsable de la coordination et de l’application du plan, décrète une augmentation de 150 % de la production des bois pour 1937 [17]. Il contredit ainsi Goering, Hermann, Reichsforstmeister, chantre du Waldvolk allemand et promoteur de la notion de Dauerwald (forêt durable) à laquelle l’avait converti son ami Walter von Keudell [18], limogé en 1937 [19].

Pendant que la forêt est tronçonnée, les sols arables sont multipliés et exploités jusqu’à l’épuisement : Goering demande à Richard Darré, ministre de l’Agriculture, de pourvoir à la mise en culture de deux millions d’hectares supplémentaires [20], sans lésiner sur l’emploi des pesticides et engrais chimiques pour augmenter les rendements, tant le projet autarcique commande de pousser les feux de la production, quitte à soumettre la population et le territoire à des tensions que les conquêtes futures, espère-t-on, vont apaiser. Darré ne rechigne aucunement : cette Erzeugungsschlacht (bataille de la production), qu’il popularise dans les rangs des paysans allemands, lui importe tout autant qu’à Goering. Richard Darré n’est pas un écologiste, mais un agronome raciste pour qui « le sol n’est […] qu’un terme dans l’équation de l’économie rurale » [21] : seules lui importent la lutte contre la désertification des campagnes, la préservation de l’identité paysanne de l’Allemagne et la production pour la race. Épuiser les sols et les nappes phréatiques ne l’effraye pas, comme en témoigne sa réaction violente à la parution d’articles dénonçant la Versteppung (« steppification ») de l’Allemagne en raison de prélèvements hydriques excessifs [22].

Au niveau local, de nombreuses études de cas montrent quelle importance revêt la protection des terroirs et des paysages sous le Troisième Reich. Là encore, malgré les proclamations de principe, applaudies par les militants de la cause, les actes montrent qu’il s’agit avant tout d’aménager et de réguler pour permettre le rendement agricole le plus élevé. En Westphalie, le projet de régulation du cours de l’Ems, longtemps combattu par le Westphälischer Heimatbund, a été imposé à partir de 1934. En présence du Gauleiter, le Reichsarbeitsdienst (service du travail) a martialement, en uniforme et pelle sur l’épaule [23], pris en charge le chantier et transformé un paysage pittoresque en canal géométrisé, aux berges angulaires et déforestées, aux rives aplanies : une désolation esthétique pour éviter toute crue et alimenter régulièrement en eau les cultures de la région, et une défaite cinglante pour les amis de la région [24].

Attardons-nous maintenant sur trois types d’espaces généralement valorisés dans le discours des protecteurs de la Heimat et de la nature avant 1933, pour examiner quel traitement le Troisième Reich leur a réservé : les zones humides, les littoraux et la montagne.

Mise en culture et colonisation : l’aryen, « Prométhée de l’humanité »

Les zones humides, tout d’abord, ne font l’objet d’aucune patrimonialisation dans le discours nazi : elles doivent être bonifiées et mises en culture. David Blackbourn, dans son Histoire du paysage allemand, montre bien que les zones de marais sont un enjeu de culture(s) et de colonisation [25]. La présence des marais à l’Est montre assez que la Pologne, par exemple, est laissée à l’abandon par une population négligente et incapable. Seuls les chevaliers teutoniques jadis, les Allemands demain, ont su et sauront aménager le pays et le mettre en culture, dans tous les sens du terme : assécher les marais pour créer une activité agricole et construire des édifices témoignant d’un niveau de culture auquel les peuples de l’Est ne peuvent manifestement prétendre. C’est un vieux topos du discours colonialiste que d’opposer les paysages maîtrisés et ordonnés du colon aux étendues désolées des colonisés. D’un côté, un peuple qui soumet la nature à la main de l’homme (à la culture, donc) et, de l’autre, une terre abandonnée, dont la sauvagerie n’a d’égale que la barbarie de ses occupants. Au terme logique de cette opposition, il y a le fait de considérer la terre abandonnée comme inoccupée, vide d’hommes dignes de ce nom : la terre inculte des sauvages appelle la mise en culture par le colon, car si elle est parsemée de bipèdes ressemblant à des hommes, elle est, en toute rigueur, une terra nullius, selon l’expression forgée par les juristes de l’Europe moderne. C’est bien ainsi que les nazis considèrent les territoires de l’Est.

On voit, une fois encore, que c’est davantage la culture que la nature qui se trouve valorisée par le discours nazi. L’homme nordique est toujours présenté comme un être de travail, de création, de performance : les participes schaffend, schöpfend, leistend – des verbes schaffen (produire), schöpfen (créer), leisten (faire, rendre, être performant) –, sans parler des substantifs Arbeit ou Werk lui sont constamment associés. L’homme nordique est celui qui impose son génie et sa volonté à une matière qu’il travaille. Homme de l’esprit et de l’effort, voué à l’idée et dévoué à sa communauté, l’homme nordique donne forme au monde : comme l’écrit Hitler dans Mein Kampf, il est le seul créateur de culture, le « Prométhée de l’humanité » [26]. Le nazisme affecte un hégélianisme vulgaire qui voit dans les créations culturelles la phénoménologisation d’un esprit créateur. Or cet esprit, ce Geist, est une émanation du sang, du Blut. L’opposition avec le juif est répétée ad nauseam : dans le film Le Juif éternel de Fritz Hippler (1941), l’aryen est présenté sous les traits de l’artiste (sculpteur et musicien, grec et médiéval, Myron, Bach ou Michel Ange) et de l’artisan (à son établi, sur son enclume), tandis que le juif est pur commerçant. Alors que l’aryen, sédentaire in-forme son monde, le juif est nomade et ne crée ni œuvre, ni valeur, se contentant de spéculer et d’échanger.

Dans le rapport au monde naturel, ce n’est donc ni la contemplation, ni la méditation qui est valorisée par les nazis, mais l’action, celle qui consiste à donner forme. Les projets d’aménagement des territoires de l’Est, élaborés par les géographes et technocrates de la SS, répondent à une lettre de mission explicite du Reichsführer-SS et, depuis 1939, commissaire du Reich pour le renforcement de la race allemande : les « paysages culturels allemands » étant les « signes de notre essence germanique », les « espaces [conquis] devront recevoir une forme correspondant à l’essence de notre race » [27], c’est-à-dire une forme qui soit la manifestation de l’esprit nordique.

Littoraux et montagne

Les littoraux, espaces instables et fragiles, sont présentés dans le discours nazi non comme des biotopes sensibles, abritant des trésors de flore et de faune (notamment avicole), mais comme des espaces de détente et de défense. Le littoral de la mer du Nord est avant tout le lieu où va se ressourcer le travailleur allemand grâce à l’action de ce qui s’affiche comme le grand comité d’entreprise du Troisième Reich, son pourvoyeur de loisirs, l’organisation Kraft durch Freude. Selon son chef, Robert Ley, le KdF n’organise pas des vacances pour elles-mêmes, mais pour que l’ouvrier allemand y reconstitue sa force de travail, ce fonds d’énergie où il ira puiser pour livrer les batailles de la production imposées par le choix de l’économie autarcique et par le Plan de quatre ans.

À cette fin, le KdF construit des centres de vacances, dont le plus impressionnant est édifié, à partir de 1936, sur l’île de Rügen. Cette île de la mer du Nord, toute de dunes et de lagunes, est un trésor naturel, dont un décret du 27 avril 1935 place la zone la plus sensible, le lido de la Schmale Heide sous protection. C’est dans cette zone classée que, pour les besoins d’une politique de loisirs orientée vers une production accrue, s’ouvre un gigantesque chantier qui doit aboutir à l’édification du colosse de Prora-Rügen [28], projet primé à l’exposition universelle de Paris en 1937 : cette résidence, qui épouse la courbe du lido, offre vingt mille places aux vacanciers du KdF dans un arc de béton de 4,5 kilomètres carrés de long. Inachevé, mais encore bien visible aujourd’hui, le bâtiment a défiguré les lieux à jamais, tandis que, des années durant, les sables et graviers de la zone classée ont été prélevés et affectés aux mélanges de béton. Projet-phare du KdF, Prora-Rügen en est devenu la métonymie, au même titre que les bateaux du KdF-Schiffe (KdF) affrétés par l’organisation pour offrir des croisières aux travailleurs allemands : la résidence de Prora est visible sur de nombreuses affiches montrant des Allemands bronzés et reposés sur fond de paysages naturels domestiqués et bétonnés.

Outre la détente, le littoral est également une zone de défense. Là encore, le béton et l’acier recouvrent les sables et graviers : il suffit d’une promenade sur les littoraux français pour apprécier la considération nazie des espaces naturels. L’organisation Todt, qui a édifié bunkers, batteries et fortifications diverses sur des milliers de kilomètres, y a eu un rôle plus décisif que les amis des oiseaux [29].

Dernier des trois archétypes de l’espace naturel, la montagne jouit dans la culture allemande d’un statut particulier, presque aussi prestigieux, quoique plus tardif, que la forêt [30] : depuis l’époque romantique, la montagne est le lieu de la confrontation au sublime, où l’homme, se mesurant à l’infini, prend conscience de sa propre finitude, tout en parcourant les vertiges et les abîmes de sa psyché (Kaspar David Friedrich a fait de son portrait d’un homme face aux sommets et aux nuées une des icônes de cette confrontation du moi à la nature). Par ailleurs, autant la forêt de basse altitude est l’objet d’une culture depuis des siècles, autant la montagne offre l’image d’une nature immaculée, dernier écrin d’une virginité primale, dernier lieu proche de la naissance des temps, des origines du sol et du sang. À cet égard, la montagne ne pouvait (ne devait, logiquement) qu’être valorisée par un discours nazi qui exaltait la proximité à l’origine. Or on constate que la montagne elle-même n’est guère appréhendée sur le mode contemplatif ou réflexif. Elle est plutôt considérée sous l’aspect architectonique et tératologique : la montagne est gewaltig, dans tous les sens du mot. Elle est gigantesque, grande et puissante comme le sont les édifices bâtis par le Führer ; elle est aussi terrifiante, monstrueuse, car elle égare, elle ensevelit et elle tue. Les Bergfilme des années 1920 et 1930, où s’illustre comme actrice, puis comme réalisatrice, la jeune Leni Riefenstahl, donnent à voir une montagne vorace et destructrice, dont les crevasses, les précipices et les avalanches engloutissent les héros qui s’y affrontent. Lieu du froid, de l’épuisement et de l’aveuglement, la montagne magnétise et perd les hommes, qui y meurent : L’Enfer blanc de Piz Palü d’Arnold Fank (avec Leni Riefenstahl, 1929) et Das blaue Licht (La lumière bleue, de et avec Leni Riefenstahl, 1932) ne montrent pas autre chose qu’un espace inquiétant qui est, avec la haute mer, le lieu par excellence où se manifeste l’hostilité de la nature envers l’homme. C’est cette Gewalt de la nature qu’il faut maîtriser (bewältigen) : la montagne est à la mesure des ambitions de maîtrise et possession affichées par le Prométhée nazi.

La montagne apparaît ainsi comme un lieu d’aménagement, où l’homme impose sa loi de géomètre. Les travaux d’infrastructures réalisés en préparation des Jeux olympiques d’hiver de Garmisch-Partenkirchen [31] font ainsi l’objet d’une généreuse couverture de presse, qui y trouve motif d’exalter le génie de l’ingénierie et du BTP allemands.

Espace du combat de l’homme contre la nature, la montagne est également un espace de guerre. Un film du cinéaste nazi Alois Trenker Berge in Flammen (Montagnes en flammes, 1931), qui célèbre la Grande Guerre des troupes alpines entre 1914 et 1918, montre des « montagnes en flammes », lieux de combats acharnés, et non d’une paix virginale, blanche et neigeuse : les chasseurs alpins allemands et autrichiens, en guerre contre l’ennemi et contre la nature, y creusent, édifient, fortifient, bombardent, minent et dynamitent. Lors de la seconde Grande Guerre, la réalité va rejoindre les images de Berge in Flammen, qui apparaissent sinon programmatiques, du moins prospectives.

À partir de l’été 1943, en raison d’une maîtrise de l’air croissante par les Alliés, les hiérarques nazis décident d’enterrer systématiquement les activités de production d’armement du Reich : machines et ouvriers devront rejoindre de gigantesques abris antiaériens, qu’il n’est cependant pas question d’édifier ex nihilo. De même que l’on use des caves et des tunnels de métro pour protéger la population, de même usera-t-on des montagnes pour produire avions et missiles à l’abri des bombardements de la Royal ou de l’US Air Force. Sous la responsabilité du ministre de l’Armement, Albert Speer, les industries privées, les ressources du génie militaire et la SS vont creuser, éventrer et excaver des montagnes par millions de mètres cubes. L’exemple le plus connu par l’ampleur (meurtrière) du projet et par le nombre des témoins est celui de l’usine souterraine de Mittelbau-Dora, dans les forêts et montagnes du Harz : pour produire des fusées V2 à la chaîne, ce sont soixante mille prisonniers du camp de Dora qui sont forcés par la SS à creuser deux cent cinquante mille mètres carrés de galeries et de voûtes. En moins de deux ans, vingt mille détenus y meurent pour livrer au Reich ses Wunderwaffen, les armes miraculeuses qui devaient renverser le cours de la guerre [32].

En Franconie, près de Nuremberg, ce sont cent mille mètres carrés de galeries et caves qui sont projetés pour construire en toute quiétude des moteurs d’avion BMW dans les montagnes du Houbirg : dix mille détenus du camp de Flossenbürg sont mobilisés, quatre mille y meurent [33]. Parfois, les nazis reconvertissent des volumes déjà excavés, comme dans les mines d’Ebensee, en Autriche. Pour y construire des V2, ce sont toutefois des halles de trente mètres de haut qui sont arrachées à la montagne, au prix de neuf mille morts [34]. Les destructions ne concernent cependant pas seulement les entrailles de la montagne, mais aussi son relief extérieur. L’exemple le plus saisissant en est la montagne du Wapelsberg (ou Walpurgisberg), près de Kahla, en Thuringe [35]. Quinze mille détenus doivent construire cent cinquante mille mètres carrés d’espaces souterrains où seront produits les Messerschmidt 262, autre Wunderwaffe du Troisième Reich. Pour faire décoller et permettre les essais de ce premier avion à réaction de l’histoire, la crête du Wapelsberg est déforestée, arasée, aplanie. Le Wapelsberg, joyau des monts de Thuringe, est défiguré. Or, avec ce lieu de culte germanique, célébré par Goethe dans sa nuit de Walpurgis (Faust), c’est à la fois une Kultur- et Naturlandschaft de premier intérêt que les nazis détruisent.

Il pourrait sembler indécent de s’apitoyer sur ces mutilations des paysages de montagne quand Mittelbau-Dora, par exemple, nous est connu avant tout par les témoignages des détenus, asservis et assignés à un travail qui devait exploiter leur énergie jusqu’à la mort par épuisement. On retient de ce camp les images, présentes partout où la SS a réduit ses détenus en esclavage, de corps décharnés, d’hommes réduits à une épure d’os et de chairs consumées par un système industriel où ils n’étaient que pur facteur de production, que pure source d’énergie vouée, jusqu’au tarissement, à une exploitation biologique exhaustive.

Que lit-on, dans ces images d’une nature détruite et d’hommes décharnés, sinon une identité de traitement et une communauté de destin ? L’opposition, construite par certains, entre une « nature » choyée par les nazis et une humanité par eux détruite, s’évanouit quand on lit plus attentivement ce que les nazis disaient de l’une et de l’autre, et quand on constate ce qu’ils en faisaient. L’une et l’autre sont réifiées, réduites à l’état d’objet, de pure matière qui s’offre à l’action de conformation et d’exploitation du Prométhée nazi : tandis que l’eugénisme perfectionne et que le racisme élimine, l’agriculture, la sylviculture, l’industrie, l’aménagement du territoire mettent la nature au pas et en ordre de bataille.

Le rapport des nazis à la nature place celle-ci au même niveau, dégradé, que les populations allogènes : de même que le rapport des nazis aux populations occupées et à leurs productions (économiques et culturelles) est un rapport de spoliation, de même leur rapport à la nature est-il d’exploitation. Dans les deux cas, il s’agit d’une prédation pure et simple, sans guère de préoccupation de durabilité de ce rapport, sans égard manifeste pour la préservation, que ce soit des peuples exploités ou des espaces détruits.

À un niveau encore inférieur, la nature a un statut similaire à celui des populations que les nazis ne font pas mystère d’utiliser et d’user (Slaves, détenus des camps) pour leurs fins : par l’utilisation, par l’usage et par l’usure, il s’agit, dans les deux cas, d’exploiter un fonds pour l’épuiser, de le consommer pour le consumer et le détruire après en avoir extrait toute l’énergie et toutes les ressources possibles. Culture et pratique fondamentalement réifiantes et destructrices des êtres et des choses, le nazisme rendra possible cette décision ultime, prise par Hitler le 19 mars 1945, et suivie d’effet là où elle put être transmise et mise en application : la destruction de toutes les infrastructures du Reich, la dévastation de son territoire pour le rendre impraticable, inhabitable et inexploitable aux vainqueurs soviétiques, qui ne devaient trouver, à leur arrivée, qu’une verbrannte Erde (terre brûlée), une terre de désolation, i.e. rendue semblable à un désert. De protection de la nature, il n’était décidément plus guère question.

Johann Chapoutot est agrégé d’histoire et docteur de l’Université Paris-I et de la Technische Universität de Berlin. Maître de conférences à l’Université Grenoble-II, il est membre de l’Institut universitaire de France.

Spécialiste de l’histoire de l’Allemagne contemporaine, il a publié Le National-socialisme et l’Antiquité (PUF, 2008), Le Meurtre de Weimar (PUF, 2010) et L’Âge des dictatures (PUF, 2008).

 

Article publié dans Vingtième Siècle. Revue d’histoire n°113, 2012/1.

 


[1] Plus récemment, le cas de Claude Allègre a montré que, désormais, face à la « pensée unique » écologiste, le Socrate technophile revendiquait son statut de martyre du dogme, tout comme d’autres se posent en victimes de l’antiracisme.

[2] Das neue Brockhaus, 1938, vol. 3, p. 346.

[3] Ibidem, p. 347.

[4] Ibidem, vol. 2, p. 378.

[5] Le nombre et la puissance des associations de Natur- und Heimatschutz est une spécificité allemande au début du XXe siècle. Les nazis ont dû composer avec cette sensibilité déjà mûre plus qu’ils ne l’auraient suscitée ou même catalysée. Voir Frank Uekotter, The Green and the Brown : A History of Conservation in Nazi Germany, Cambridge, Cambridge University Press, 2006, p. 83.

[6] Voir Johann Chapoutot, Le National-Socialisme et l’Antiquité, Paris, PUF, 2008, chap. 1.

[7] Richard Walther Darré, Blut und Boden : ein Grundgedanke des Nationalsozialismus, Berlin, Reichsdruckerei, 1936, p. 8.

[8] Voir notamment Anna Bramwell, Blood and Soil : Richard Walther Darré and Hitler’s « Green Party », Bourne End, Kensal Press, 1985. Ses conclusions sont très contestées par l’historiographie récente (voir infra).

[9] Adolf Hitler, discours au Reichstag, 23 avril 1939, cité dans Max Domarus, Hitler : Reden und Proklamationen, 1932-1945, Würzburg, Verlagsdruckerei Schmidt, 1962, vol. 1, p. 1178-1179.

[10] Adolf Hitler, propos privé, conversations du 18 janvier et du 4 février 1942, Wolfschanze, cité dans Henry Picker (dir.), Hitlers Tischgespräche im Führerhauptquartier : 1941-42, Bonn, Athenäum, 1951, Stuttgart, Seewald, 1976.

[11] Johannes Zechner, « “Die grünen Wurzeln unseres Volkes” : zur ideologischen Karriere des deutschen Waldes », in Uwe Puschner et Ulrich Grossmann, Völkisch und national : zur Aktualität alter Denkmuster im 21. Jahrhundert, Darmstadt, WBG, 2009, p. 179-194.

[12] « Der Sinn unseres Lebens », SS-Leitheft, 1939, Folge 4, p. 27-30, p. 28.

[13] Richard Walther Darré, Neuadel aus Blut und Boden, Munich, Lehmann, 1930, p. 133-134.

[14] Ibidem, p. 134.

[15] Dès 1919, par ailleurs, la protection de la nature est une disposition constitutionnelle, comme en témoigne l’article 150 de la Constitution de Weimar. Voir Charles Closmann, « Legalizing a Volksgemeinschaft : Nazi Germany’s Reich Nature Protection Law of 1935 », in Franz-Joseph Bruggemeier, Mark Cioc et Thomas Zeller (dir.), How Green Were the Nazis ? Nature, Environment and Nation in the Third Reich, Athens, Ohio University Press, 2005, p. 18-42, p. 29.

[16] Thomas Lekan, « The Reich Nature Protection Law and Regional Planing in the Third Reich », in Franz-Joseph Bruggemeier, Mark Cioc et Thomas Zeller (dir.), op. cit., p. 73-100, p. 94.

[17] Michael Imort, « The Rhetoric and Reality of National Socialist Forest Policy », in Franz-Joseph Bruggemeier, Mark Cioc et Thomas Zeller (dir.), op. cit., p. 43-72, p. 57.

[18] Aristocrate prussien, Walter von Keudell a été renvoyé de la fonction publique prussienne après sa participation au putsch de Kapp en 1920. Membre du DNVP, député au Reichstag, il a été ministre de l’Intérieur (1927-1928). Spécialiste des questions forestières, il entre au NSDAP en 1933 avant d’être nommé Generalforstmeister de Prusse.

[19] Ibidem, p. 58.

[20] Thomas Lekan, op. cit., p. 92.

[21] Gesine Gerhard, « Richard Walther Darré’s Agrarian Ideology », in Franz-Joseph Bruggemeier, Mark Cioc et Thomas Zeller (dir.), op. cit., p. 129-146, p. 139.

[22] Thomas Zeller, « Alwin Seifert and the Third Reich », in Franz-Joseph Bruggemeier, Mark Cioc et Thomas Zeller (dir.), op. cit., p. 147-170, p. 156.

[23] Kirian Klaus Patel, Soldaten der Arbeit : Arbeitsdienste in Deutschland und in den USA, 1933-1945, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht, 2003.

[24] Frank Uekotter, op. cit., p. 109-124.

[25] David Blackbourn, The Conquest of Nature : Water, Landscape and the Making of Modern Germany, Londres, Random House ; trad. all., id., Die Eroberung der Natur : eine Geschichte der deutschen Landschaft, trad. de l’angl. par Udo Rennert, Munich, Deutsche Verlags-Anstalt, 2006, chap. 5, « Rasse und Bodengewinnung », p. 307-376.

[26] Adolf Hitler, Mein Kampf, édition de 1940, p. 317.

[27] David Blackbourn, op. cit., p. 323.

[28] Voir Bernfried Lichtnau, Prora auf Rügen : das unvollendete Projekt des 1. KDF-Seebades in Deutschland, Peenemünde, Dietrich, 1995.

[29] Voir Andreas Heusler, Rüstung, Kriegswirtschaft und Zwangsarbeit im «Dritten Reich», Munich, Oldenbourg, 2010.

[30] Voir Albrecht Lehmann, « Der deutsche Wald », in Étienne François et Hagen Schulze (dir.), Deutsche Erinnerungsorte, Munich, Beck, 2003, vol. 3, p. 187-200.

[31] David C. Large, Nazi Games : The Olympics of 1936, Londres, W. W. Norton, 2007.

[32] Voir Jens-Christian Wagner, Produktion des Todes : das Konzentrationslager Mittelbau-Dora, Göttingen, Wallstein, 2001.

[33] Voir Wolfgang Benz, Flossenbürg : das Konzentrationslager und seine Aussenlager, Munich, Beck, 2007.

[34] Voir Florian Freund, Arbeistlager Zement : das Konzentrationslager Ebensee und die Rakentenrüstung, Vienne, Verlag für Gesellschaftskritik, 1989.

[35] Voir Markus Gleichmann, Düsenjäger über dem Walpersberg : die Geschichte des unterirdischen Flugzeugwerkes Reimagh bei Kahla, Zella-Mehlis, Heinrich Jung, 2004.

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