Jérôme Baschet, L’inacceptable inacceptable, 2021

De(s)générations : Tu parles de la nécessité, entre autres dans Défaire la tyrannie du présent [1], de se « débarrasser » des mythologies progressistes. Tu mets en question un paradigme progressiste révolutionnaire qui serait celui du Grand Soir ou, comme le nomme Frédéric Lordon, le « point L » (comme Lénine). Pourtant, si je t’ai bien lu, il ne me semble pas que tu sois totalement opposé à l’événement révolutionnaire car tu apportes une nuance dans Basculements :

« Il faudrait plutôt concevoir un processus qui commence dès maintenant, sans pour autant exclure des épisodes d’intensification de l’affrontement avec le monde de l’économie. » [2]

Tu critiques la stratégie du Grand Soir tout en proposant d’autres notions qui n’excluent pas fondamentalement celle-ci. Pourrais-tu ici revenir sur la manière dont ces deux tendances pourraient s’articuler de manière fructueuse ? Y a-t-il réellement incompatibilité ? Ces deux stratégies ne peuvent-elles pas exister comme deux régimes de temporalité concomitants ?

Jérôme Baschet : J’aimerais tenter d’écarter un possible malentendu. Je fais en effet la critique de l’imaginaire du Grand Soir, tel que Frédéric Lordon l’a récemment revendiqué. Mais l’hypothèse stratégique proposée dans Basculements – et, précédemment, dans Une juste colère [3] – n’exclut pas du tout une dynamique de soulèvements et d’affrontements avec le monde de l’Économie et les forces qui le défendent. Plus précisément, et je vais y revenir, cette hypothèse stratégique repose sur la combinaison entre la multiplication de ce que j’appelle des espaces libérés et une intensification des dynamiques de blocage dans toutes les dimensions que ce terme peut recouvrir, jusqu’à la propagation de soulèvements populaires, ainsi qu’on l’a vu avec les Gilets jaunes et la séquence insurrectionnelle planétaire de l’année 2019. Lire la suite »

Publicité

Radio: Mathieu Amiech, La gestion sanitaire de la covid-19, 2023

Mathieu Amiech, membre des éditions La Lenteur et du collectif Écran total (résister à la gestion et l’informatisation de nos vies), revient sur la gestion de l’épidémie de Covid-19 due a la diffusion du virus SARS-Cov-2 durant les années 2020-2022.

Émission issue de « L’actualité des luttes » diffusée sur Radio Fréquence Paris Plurielle le 2 janvier 2023.

Afin de resituer le contexte dans lequel Matthieu Amiech fait cette émission, il faut préciser qu’elle est en quelque sorte une mise au point par rapport à une autre émission qui a été diffusée également sur les ondes de Radio FPP. Il s’agit de « Zoom Ecologie » intitulée « Bilan critique du courant anti-industriel » du 18 octobre 2022, où Matthieu Amiech était accusé de « covido-négationniste », en même temps qu’étaient mise en cause les positions du collectif Écran total (résister à la gestion et l’informatisation de nos vies) sur la crise sanitaire et l’obligation vaccinale.

« Le point essentiel que je voudrais souligner, c’est que considérer le Covid-19 comme un danger absolu, radicalement nouveau, qui change totalement notre situation personnelle et collective, cela n’est possible que si l’on refoule profondément le caractère pathogène de notre société capitaliste et industrielle. C’est-à-dire que l’on occulte le fait que l’on est déjà, en temps ordinaire, dans une situation où l’on est environné de dangers, de nuisances, qui viennent de beaucoup de nos habitudes de consommation quotidiennes déjà très ancrées. »

.

Racine de moins un
Une émission
de critique des sciences, des technologies
et de la société industrielle.

.
Émission Racine de Moins Un n°84,
diffusée sur Radio Zinzine en mars 2023. Lire la suite »

Jeanne Burgart-Goutal, Ce que le féminisme apporte à l’écologie, 2018

« Hirvi Dharti, Stri Shakti, Manav Murti »

« Terre verte, puissance féminine, libération humaine » [1]

 

Résumé

En quoi les concepts et points de vue développés par le féminisme, à première vue sans lien avec la crise environnementale, permettent-ils en fait de féconder la pensée écologiste ? À travers l’étude des discussions que l’écoféminisme a tissées au il du temps avec d’autres courants, je voudrais montrer que, loin de n’être qu’un cas particulier de la pensée écologiste, il constitue un outil de critique et de dépassement de la façon même dont les problèmes y sont généralement posés. Lire la suite »

Veronika Bennholdt-Thomsen et Maria Mies, Subsistance et économie mondialisée, 1997

En introduction de leur ouvrage La Subsistance. Une perspective écoféministe, Veronika Bennholdt-Thomsen et Maria Mies nous racontent ce qu’elles ont appris d’une conversation entre des femmes d’un village du Bangladesh et Hillary Clinton, qu’elles utilisent ensuite pour expliquer leur perspective sur la subsistance, une perspective « d’en bas ». En voici quelques extraits.

Une vache pour Hillary

En avril 1995, quelques mois avant le début de la Conférence mondiale des femmes organisée par les Nations unies à Pékin, Hillary Clinton, alors première dame des Etats-Unis, a fait un voyage au Bangladesh. Elle est allée voir par elle-même si les projets menés par la Grameen Bank dans les villages du Bangladesh, projets dont elle avait tant entendu parler, étaient bel et bien un succès. Les microcrédits de la Grameen Bank avaient la réputation d’avoir remarquablement amélioré le sort des paysannes dans ce pays, et Mme Clinton voulait savoir si les femmes avaient véritablement gagné en autonomie [empowered] grâce à ces microcrédits. Pour la Grameen Bank et les organismes de développement, « l’autonomisation des femmes » revient à ce qu’une femme ait quelques biens et un revenu personnel en monnaie. Lire la suite »

Veronika Bennholdt-Thomsen and Maria Mies, Subsistence and globalised economy, 1997

Maria Mies, 2011

Introducing their book The Subsistence Perspective: Beyond the Globalised Economy, Veronika Bennholdt-Thomsen and Maria Mies tell us what they learned from a conversation between women in a Bangladeshi village and Hillary Clinton, which they then use to explain their perspective on subsistence, a perspective “from below”. Here are some excerpts.

A cow for Hillary

In April 1995, some months before the beginning of the UN World Women’s Conference in Beijing, Hillary Clinton, the First Lady of the USA, visited Bangladesh. She had come to find out herself about the success stories of the Grameen Bank projects which were said to have so empowered rural women in Bangladesh. For the Grameen Bank and development agencies, “empowerment of women” means that a woman has an income of her own and that she has some assets. Lire la suite »

Veronika Bennholdt-Thomsen y Maria Mies, Subsistencia y la economía globalizada, 1997

Maria Mies, 2011

En la introducción de su libro La Perspectiva de Subsistencia: Más Allá de la Economía Globalizada, Veronika Bennholdt-Thomsen y Maria Mies nos cuentan lo que aprendieron de una conversación entre mujeres de una villa de Bangladesh y Hillary Clinton, que luego usaron para explicar su perspectiva sobre el subsistencia, una perspectiva “desde abajo”. He aquí algunos extractos.

Una vaca para Hillary

En abril de 1995, unos meses antes de que comenzara la Conferencia Mundial de Naciones Unidas sobre la Mujer en Beijing, Hillary Clinton, la Primera Dama de los Estados Unidos, visitó Bangladesh. Había llegado hasta allí para ver por sí misma los éxitos obtenidos por los proyectos del Banco Grameen, de los que se decía que tanto habían fortalecido económicamente a las mujeres de Bangladesh. Para el Banco Grameen y las agencias de desarrollo este empoderamiento de las mujeres significa que una mujer tiene un ingreso propio y que cuenta con algunos bienes. Lire la suite »

Nicolas Bonanni, Que défaire ?, 2022

Nicolas Bonanni a publié un petit ouvrage intitulé Que défaire ? pour retrouver des perspectives révolutionnaires aux éditions Le Monde à l’envers en mars 2022 (100 pages, 6 euros). Voici quelques extraits de l’introduction.

Nous sommes nombreux et nombreuses à fréquenter les manifs rituelles «salaires, retraites, pouvoir d’achat» qui rythment la vie militante, pour empêcher le gouvernement de détricoter le système de retraites ou le droit du travail. On se retrouve aussi dans les manifs contre l’extrême droite, pour le droit au logement, dans les AG à la Bourse du travail, les rassemblements pour les droits des sans-papiers, les manifs à vélo en soutien à Notre-Dame-des-Landes, la défense des services publics, etc. L’étiquette qui réunit toutes ces luttes, qui nous réunit: l’anticapitalisme. On conteste le règne du capital sur le monde, on voudrait défaire le capitalisme, on voudrait établir d’autres rapports sociaux, plus égalitaires; ne pas laisser les profits et le «chacun pour soi» prendre toute la place. À la froide rationalité des actionnaires, nous préférons les valeurs de liberté, d’égalité, de dignité et de justice. […]

Mais on a surtout l’impression de limiter la casse. On a du mal à dessiner un espoir au milieu de la glaciation libérale : l’horizon semble bouché, et s’incarne par des duels Macron / Le Pen au deuxième tour. Nous nous sentons coincés entre les partisans du chacun pour soi et ceux du chacun chez soi. L’enfer. […] Lire la suite »

Bifurquons, maintenant !, 2022

Un second et ultime appel des diplômés d’AgroParisTech

La semaine dernière, une poignée d’élèves d’AgroParisTech profitaient de la cérémonie de remise de leurs diplômes pour lancer un appel à la désertion (texte et vidéo). Ce mercredi 18 mai à midi, vient d’être mis en ligne un second appel qu’ils présentent comme le dernier et qui s’achève par une invitation et un rendez-vous. Le voici.

Le constat est clair : ce système est un monstre à bout de souffle.
Personne ne nous a contredit sur ce point.
Et des millions ont même partagé notre cri de liberté.
Vous êtes si nombreuses à nous en avoir parlé, à en avoir parlé à d’autres ! Lire la suite »

Sylvaine Bulle, Une politique d’émancipation doit mettre l’État à distance, 2020

Entretien avec la sociologue Sylvaine Bulle, autrice d’une enquête sur des expériences d’autonomie politique. Elle explique comment la pandémie peut renforcer le désir de ne pas être gouverné, et inciter à la recherche d’autres formes de vie.

 

S’il est actuellement beaucoup question du retour de l’État et de la restauration de la souveraineté, à droite comme à gauche du spectre politique, d’autres traditions militantes et intellectuelles se situent aux antipodes de cette logique. Au contraire, elles portent une critique radicale de l’État, qui n’en vise pas seulement les aspects les plus autoritaires et coercitifs, mais tout bonnement la prétention à gouverner les populations.

Pour évoquer cette mouvance, Mediapart s’est entretenu avec Sylvaine Bulle, professeure de sociologie à l’ENSA Paris Val de Seine (Université de Paris) et autrice d’Irréductibles. Enquête sur des milieux de vie de Bure à Notre-Dame-des-Landes (UGA Éditions, collection Écotopiques, 2020). Elle décrit les principes et les réalisations des « zones autogouvernées », et met en avant leurs atouts en temps de crise sanitaire. Elle répond aussi aux objections traditionnellement soulevées par ces expériences, comme celles qui moquent leur caractère localement circonscrit. Lire la suite »

Radio : A. Berlan et F. Scheidler, Déboulonner la Mégamachine, 2021

Nous ressentons toutes et tous un sentiment d’impuissance face à la « mégamachine », le complexe capitaliste et industriel dans laquelle nos sociétés sont engluées, ainsi qu’à la difficulté à imaginer une alternative à ce système. Fabian Scheidler et Aurélien Berlan donnent à travers leurs ouvrages des pistes pour déboulonner cette « mégamachine ».

Aurélien Berlan, docteur en philosophie, auteur de Terre et liberté. La quête d’autonomie contre le fantasme de délivrance (La Lenteur, 2021, 220 pages). Lire un extrait sur le site de la revue Terrestre.

Fabian Scheidler, philosophe et dramaturge allemand, auteur de La Fin de la mégamachine. Sur les traces d’une civilisation en voie d’effondrement (Seuil, 2020, 620 pages). Lire la présentation de l’ouvrage par son traducteur Aurélien Berlan.

Une conférence organisée par l’Atelier d’écologie politique (Atecopol) de Toulouse le 22 octobre 2021.

.

Racine de moins un
Une émission
de critique des sciences, des technologies
et de la société industrielle.

.
Émission Racine de Moins Un n°72,
diffusée sur Radio Zinzine en décembre 2021.

.

 

Radio Zinzine
2021: 40 ans de Radio Zinzine