Marshall Sahlins, La destruction de la conscience à la NAS, 2013

Aux Etats-Unis, on connaissait les créationnistes, fondamentalistes chrétiens qui cherchent à interdire l’enseignement de l’évolution des espèces au profit du récit biblique de la Genèse. Mais dans les milieux académiques sévit également une autre forme d’obscurantisme : les fondamentalistes darwiniens qui, avec la sociobiologie, cherchent à naturaliser la lutte pour la vie dans les sciences humaines, avec la bénédiction et le soutien de l’Armée américaine. Au début de l’année 2013, l’anthropologue Marshall Sahlins a fait un coup d’éclat pour dénoncer cette évolution suicidaire au sein des institutions scientifiques. Ci-dessous la traduction d’un article de la presse américaine et d’une interview avec Marshall Sahlins.

Vendredi 23 février 2013, Marshall Sahlins, notre estimé collègue en anthropologie de l’Université de Chicago, a solennellement démissionné de la société scientifique la plus prestigieuse des États-Unis, la National Academy of Sciences [Académie Nationale des Sciences, NAS dans la suite].

Sahlins déclare que sa démission est provoquée par son « opposition à l’élection de Napoléon Chagnon et aux projets de recherche militaire de l’Académie. » Sahlins a été élu à la NAS en 1991. Voici la déclaration qu’il a publiée pour expliquer sa démission :

« Comme le prouvent ses propres écrits ainsi que le témoignage d’autres personnes, y compris celui des peuples amazoniens et des spécialistes qui observent cette région, Chagnon a fait beaucoup de mal aux communautés indigènes au sein desquelles il a effectué ses recherches. Parallèlement, ses déclarations “scientifiques” concernant l’évolution humaine et la sélection génétique en faveur de la violence masculine – comme dans l’étude célèbre qu’il a publiée dans la revue Science en 1988 – s’avèrent superficielles et sans fondement, ce qui n’est pas à l’honneur de l’anthropologie. Son élection à la NAS est, au mieux, une énorme bévue morale et intellectuelle de la part de ses membres. À tel point que ma propre participation à l’Académie est devenue gênante.

Je ne souhaite pas non plus me rendre complice de l’assistance, de l’encouragement et du soutien que la NAS procure à la recherche en sciences sociales afin d’améliorer les performances de l’armée américaine, étant donné tout ce que cette armée a coûté de sang, de richesse et de bonheur au peuple américain, et les souffrances qu’elle a infligées à d’autres peuples au cours des guerres inutiles de ce siècle. Je crois que la NAS, si elle s’engage dans ce type d’activités, devrait d’abord réfléchir au moyen de promouvoir la paix et non de faire la guerre. »

Napoléon Chagnon est devenu célèbre après son travail chez les Yanomami (on dit aussi Yanomamo) dans les forêts tropicales du nord-est du Bassin de l’Orinoco en Amérique du Sud au cours des années 1960 et 1970. Il a écrit une ethnographie à fort tirage qui sert d’introduction aux cours d’anthropologie dans le monde entier, désignant les Yanomami comme « le peuple féroce » parce qu’au cours de son travail sur le terrain, il avait observé de nombreuses luttes guerrières à l’intérieur des groupes et entre les groupes, luttes qu’il allait qualifier de dispositions innées, caractéristiques de l’humanité dans une sorte d’état de nature imaginaire.

Actuellement, Chagnon se complaît sous les feux de la rampe à l’occasion d’une tournée nationale pour le lancement d’un essai, Nobles Sauvages [1], dans lequel il dépeint la majeure partie des anthropologues américains comme des crétins post-modernes, opposés à la science, des faibles d’esprit impliqués dans une guerre contre la science. En vérité, aucune « guerre des sciences » ne fait rage en anthropologie, elle n’existe que dans les distorsions du New York Times et de quelques autres tourbillons médiatiques. Par contre, nombre d’anthropologues qui récusent le travail de Chagnon le font parce qu’ils considèrent que sa recherche est de mauvaise qualité.

Sur son blog, Anthropomics [2], l’anthropologue Jonathan Marks qualifie Chagnon d’« anthropologue incompétent », et il ajoute :

« Permettez-moi de préciser ce que j’entends par ‘incompétent’. Les méthodes qu’il emploie pour recueillir, analyser et interpréter ses données sortent du champ des pratiques anthropologiques admissibles. Oui, il a vu les Yanomamo faire de vilaines choses. Mais lorsqu’il en a tiré la conclusion que les Yanomamo étaient par nature “féroces”, il a perdu toute crédibilité anthropologique, car il n’avait rien démontré de tel. Il a le droit d’avoir ses opinions, au même titre que les créationnistes et les racistes ont le droit d’avoir les leurs, mais les preuves ne corroborent pas sa conclusion, ce qui le rend scientifiquement incompétent. »

C’est la médiocrité de son travail et la teneur sociobiologique de son analyse, et non une opposition à la science, qui expliquent que les anthropologues rejettent assez généralement les interprétations de Chagnon.

Mon directeur de thèse, l’anthropologue Marvin Harris, fut l’un des critiques de Chagnon les plus déterminés. Harris était lui-même un archi-positiviste et un inébranlable défenseur de la méthode scientifique, il a cependant récusé Chagnon et les résultats sociobiologiques de ses recherches au cours de débats académiques acharnés qui se sont poursuivis pendant plusieurs décennies, non parce que Harris était contre la science, mais parce que Chagnon était un piètre scientifique. (Il faut aussi rappeler que Harris et Sahlins ont eu de vives discussions bien connues portant sur des désaccords théoriques fondamentaux, mais tous deux s’accordent pour protester contre la militarisation de cette discipline et pour récuser le travail sociobiologique de Chagnon).

Si, au sein de l’anthropologie, des conflits avaient réellement lieu entre deux camps imaginaires, pour ou contre la science, je suppose que je serais comme tout le monde résolument dans le camp de la science ; mais même dans ce cas, je ne serais pas prêt pour autant à accepter la validité et la fiabilité (qui caractérisent la bonne science) des conclusions de Chagnon, pas plus que ceux qui, soi-disant, rejettent les fondements de la science.

En 2000, l’Association Anthropologique Américaine a évidemment traversé une période de crise pénible, à la suite de la publication du livre de Patrick Tierney, Darkness in El Dorado [3], dans lequel Chagnon et d’autres anthropologues chez les Yanomami étaient accusés de nombreux méfaits (exploitation et pire encore) – voir l’essai de Barbara Rose Johnston sur le film de José Padilha, Secrets of the Tribe [4]. Sans entrer dans les détails de tous les méandres qui ont abouti à la démolition de Chagnon et de l’insuffisance de ce qu’il avance, il va de soi que la décision d’offrir au Dr Chagnon l’un des sièges de premier choix au sein de la Section 51 (anthropologie) de la NAS est une insulte pour une grande partie des anthropologues, qu’ils se disent scientifiques ou non.

La démission de Marshall Sahlins est une prise de position héroïque contre la subversion de la science face à ceux qui prétendent que la violence est inhérente à la nature humaine, et contre la militarisation croissante de la science. Bien que la réputation de Sahlins en tant qu’opposant à la militarisation du savoir soit bien établie – on sait qu’il est à l’origine de l’organisation du teach-in contre la guerre du Vietnam de février 1965 à l’Université du Michigan – il a tout de même dû lui être difficile d’abandonner ce poste prestigieux.

Fin 1965, Sahlins s’est rendu au Vietnam afin de se renseigner directement sur la guerre et les Américains qui y participaient, travail dont son essai le plus important, La destruction de la conscience au Vietnam, est l’aboutissement. Il devint l’une des voix les plus claires et les plus puissantes de l’anthropologie, s’élevant contre les tentatives de militarisation de l’anthropologie, que ce soit au cours des années 1960 et 1970, ou à nouveau après le 11 septembre 2001.

En 2009, j’ai participé à une conférence à l’Université de Chicago dont l’objet était l’examen critique des démarches renouvelées de l’armée américaine et des services de renseignement dans le but d’utiliser des données anthropologiques dans les projets contre-insurrectionnels. L’exposé de Sahlins soutenait que :

« Au Vietnam, la célèbre stratégie anti-insurrectionnelle était chercher et détruire ; ici, il s’agit de rechercher et détruire. On pourrait penser que c’est une bonne chose que l’armée se soit approprié la théorie anthropologique de manière incohérente, simpliste et désuète – pour ne pas dire ennuyeuse – alors même que ses protocoles ethnographiques pour connaître la société et la culture locales ne sont que des fantaisies inutilisables. » [5]

Sahlins m’a envoyé un e-mail, ainsi qu’a tous les membres de la Section 51 de la NAS, annonçant deux nouveaux « projets d’accord » sponsorisés par l’Institut de Recherche de l’Armée. Le premier projet examinait « Le contexte des environnements militaires : facteurs sociaux et organisationnels », le second : « Mesurer les capacités humaines : potentiel de performance des individus et des collectifs ». À la lecture de la présentation de ces projets, il me paraît évident que l’armée veut obtenir l’assistance de chercheurs capables de rationaliser les opérations militaires en utilisant les sciences sociales et la manipulation des structures sociales pour permettre à des groupes interchangeables travaillant sur des projets militaires d’assurer une liaison en douceur. Il me semble de plus en plus que le rôle d’animateur dans l’armée soit celui qu’envisagent les Américains pour les chercheurs en sciences sociales [6].

Voici ensuite l’échange que j’ai eu avec Sahlins pour parler de l’élection de Chagnon à la NAS, de sa démission, et des liens de l’Académie avec des projets militaires.

Price : Comment Chagnon a-t-il réussi à transformer en attaques contre la science elle-même les nombreuses attaques dirigées contre sa recherche inquiétante sur le plan éthique et contre ses méthodes et ses conclusions discutables sur le plan scientifique ?

Sahlins : Chagnon n’a pas répondu aux questions qui se posaient, notamment à la critique de ses prétendus résultats empiriques, comme son article de la revue Science en 1988, ni aux nombreuses critiques de la part d’anthropologues amazoniens au sujet de son ethnographie superficielle et de sa description ignoble et dénaturée des Yanomami. Les chercheurs Cro-Chagnon refusent tout simplement de discuter les faits de l’argument ethnographique. Au lieu de quoi, ils lancent des attaques ad hominem – avant, c’était contre les Marxistes, maintenant c’est contre « les humanistes au cerveau confus ». En même temps, ils essaient de faire de l’ensemble des critiques une persécution idéologique contre la science – et encore une fois, pour détourner l’attention de la nécessité de discuter les conclusions empiriques. Pendant ce temps, au nom de la science, on passe complètement sous silence les dommages, physiques et émotionnels, infligés aux Yanomami, ainsi que l’incitation irréfléchie à la guerre induite par ses méthodes de terrain. Rechercher et détruire, c’est ainsi que j’ai appelé cette méthode. Une dérobade morale intégrale.

Price : L’essentiel de la publicité qui entoure votre démission de la NAS se concentre exclusivement soit sur l’élection de Napoleon Chagnon, soit sur une soi-disant « guerre des sciences » en anthropologie, alors que très peu d’attention médiatique est accordée à vos déclarations contre les liens de plus en plus fréquents entre la NAS et des projets militaires. Quelles ont été les réactions au sein de la Section 51 de la NAS à l’appel d’octobre 2012 conviant tous les membres de l’Académie à faire de la recherche dans le but d’améliorer l’efficacité de la mission de l’armée ?

Sahlins : la NAS n’effectuerait pas la recherche de guerre elle-même. Elle recruterait plutôt dans ses sections – comme on le voit dans les mémos de la Section 51 – et ainsi participerait probablement au contrôle des rapports avant leur publication. Le Conseil National de la Recherche organise la recherche proprement dite, évidemment en collaboration avec la NAS. Il s’agit d’un nouveau tentacule de la militarisation de l’anthropologie et des autres sciences sociales, dont le Human Terrain Systems est un exemple connu. Celui-ci est aussi insidieux que scélérat.

Price : Y a-t-il eu un dialogue interne entre les membres de la Section 51 de la NAS lors de ces appels à travailler sur ces nouveaux projets financés par l’Institut de la Recherche de l’Armée ?

Sahlins : Je n’ai connaissance d’aucune correspondance, qu’elle soit destinée aux chefs de section ou échangée entre membres s’il y en a eu, ce que j’ignore.

Price : Quelle réponse – si elle existe – avez-vous obtenu de la part des autres membres de la NAS ?

Sahlins : Quasiment aucune. L’un d’eux a dit que j’avais toujours été contre la sociobiologie [7].

Price : Essayons d’associer les thèmes qui sont au cœur de ce que Chagnon prétend connaître de la nature humaine et le soutien que la NAS apporte aux projets de l’armée américaine ; pouvez-vous nous dire ce que vous pensez du rôle de la science et des institutions scientifiques dans une culture aussi imprégnée de militarisme que la nôtre ?

Sahlins : J’y ai consacré un ou deux paragraphes dans mon opuscule La Nature humaine : une illusion occidentale, que je n’ai pas sous la main, et je cite Rumsfeld [8] qui dit en substance (en paraphrasant une réplique du film Full Metal Jacket) que chaque Musulman du Moyen Orient recèle un Américain, conscient de son intérêt personnel et épris de liberté, et qu’il suffit d’extirper les démons qui lui donnent d’autres idées. La politique extérieure américaine au niveau mondial, et en particulier celle des néo-conservateurs, ne repose-t-elle pas sur la confusion entre la cupidité capitaliste et la nature humaine ? Délivrons-les tous de ces idéologies fallacieuses imposées de l’extérieur. Pour voir les choses autrement, reportez-vous à l’opuscule cité ci-dessus à propos de la seule et authentique parenté universelle, ainsi qu’au petit livre que j’ai publié le mois dernier : What Kinship Is – And Is Not [NdT : La parenté : ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas].

Price : Vous parlez d’une volonté de reporter sur les institutions qui soutiennent la paix les financements dont bénéficient celles qui soutiennent l’armée. Avez-vous une idée de la manière dont pourrait s’effectuer ce report ?

Sahlins : Je n’y ai pas réfléchi, probablement parce qu’il est actuellement impensable que la NAS fasse une chose pareille.

Au plan international, le point de vue de Sahlins bénéficie d’une adhésion croissante. Marshall m’a fait part d’un message qu’il a reçu du Professeur Eduardo Viveiros de Castro, du Musée National de Rio de Janeiro, dans lequel il dit ceci :

« Les écrits de Chagnon sur les Yanomami ont grandement contribué à renforcer les préjugés les plus négatifs contre ce peuple indigène, qui n’a certes pas besoin des stéréotypes que répand le genre d’anthropologie pseudo-scientifique à laquelle Chagnon a choisi de se consacrer à leurs dépens. Les Yanomami sont tout sauf les robots sociobiologiques impitoyables et malfaisants que Chagnon décrit – car il projette vraisemblablement sur eux la perception qu’il a de sa propre société (ou de sa propre personnalité). C’est un peuple indigène qui a, contre toute attente, réussi à survivre en maintenant ses traditions dans une Amazonie de plus en plus menacée de destruction sociale et environnementale. Ils possèdent une culture originale, vigoureuse et inventive ; leur société est infiniment moins « violente » que la société brésilienne ou américaine.

Presque tous les anthropologues qui ont travaillé avec les Yanomami – et nombre d’entre eux ont une expérience de terrain avec ce peuple beaucoup plus étendue que Chagnon – jugent ses méthodes d’investigation pour le moins discutables et ses représentations ethnographiques fantaisistes. L’élection de Chagnon à la NAS ne fait pas honneur à la science américaine ni à l’anthropologie en tant que discipline, et elle est de mauvais augure pour les Yanomami. En ce qui me concerne, je considère Chagnon comme un ennemi des Indiens d’Amazonie. Je ne peux que remercier le Professeur Sahlins d’avoir pris cette position courageuse et ferme en faveur des Yanomami et de la science anthropologique. »

Nous en arrivons à nous demander ce qu’il adviendra de la science, qu’il s’agisse de celle avec un S majuscule (parfois aveugle) ou de celle avec un s minuscule, mue par la curiosité, lorsque ceux qui dénoncent ses pratiques, ses mauvaises utilisations et ses conséquences néfastes sont de plus en plus marginalisés ; alors que ceux dont les conclusions sont en phase avec des valeurs guerrières plus largement répandues dans notre culture reçoivent l’accolade. Le fait que la NAS apporte son soutien à un personnage qui est la source d’autant de divisions que Chagnon, en diabolisant ceux qui le critiquent, et en prétendant qu’ils s’attaquent non à ses pratiques mais à la science même, porte préjudice à la crédibilité de ces chercheurs. Il est regrettable que la NAS se soit engagée dans cette impasse.

La dynamique de cette source de divisions ne concerne pas que ce petit segment de la communauté scientifique. Dans son essai de 1966 sur La destruction de la Conscience au Vietnam, Sahlins avançait qu’afin de poursuivre la guerre, l’Amérique était obligée de détruire sa propre conscience –autrement, regarder en face ceux que nos actions détruisaient était trop demander à la nation. Il écrivait :

« Il faut détruire la conscience : elle doit rester dans le canon  du fusil, elle ne peut pas se prolonger dans la balle. Donc toutes les logiques secondaires se fondent dans l’arrière-plan. La guerre acquiert un but transcendant et dans ce genre de guerre, tout ce qui contribue au triomphe du camp de Dieu est vertueux, et toutes les morts sont malheureusement nécessaires. La fin justifie les moyens. »

La situation devient tragique quand tous les gens qui ont une conscience n’ont plus d’autre choix que la démission ; mais rompre une association est parfois la déclaration la plus forte que l’on puisse faire courageusement.

David H. Price

Professeur d’anthropologie à St Martin’s University, Washington.

Auteur de Weaponizing Anthropology: Social Science in Service of the Militarized State [Armer l’Anthropologie : la science sociale au service de l’État militarisé] éd. CounterPunch Books.

Article original : The Destruction of Conscience in the National Academy of SciencesCounter Punch, 26 février 2013.


[1] Napoleon Chagnon : Noble Savages : My Life Among Two Dangerous Tribes – the Yanomamo and the Anthropoligists [Nobles sauvages : ma vie au sein de deux dangereuses tribus – les Yanomamo et les anthropologistes].

[2] Anthropomics : le nom de ce blog est un mélange de anthropologist et de comics. Sur ce blog, Marks est encore plus précis :

« Chagnon est connu en anthropologie comme le contre exemple de bonnes pratiques sur le terrain. C’est l’anthropologiste qui a travaillé avec les Yanomamo en les montant les uns contre les autres (en violant leurs tabous sur les morts afin de collecter des informations généalogiques), en les armant de machettes, et qui ensuite en naturalisant les violences qui s’en sont suivies dans son étude intitulée “Le peuple féroce”, a éliminé de ses conclusions l’histoire, la politique et ses propres méthodes d’analyse. »

[3] Patrick Tierney est un journaliste indépendant. Darkness in El Dorado : How scientists and journalists devastated the Amazon. Traduction française : Au nom de la civilisation : comment anthropologues et journalistes ont ravagé l’Amazonie, éd. Grasset, 2002.

[4] Le documentaire Secrets of the Tribe est sorti en 2010 au Sun Dance Festival. Il est inspiré du livre de Tierney et donne la parole aux Yanomami et aux anthropologues accusés de méfaits. Barbara Rose Johnston était présent à cette projection et est intervenue dans le débat, voir <http://www.counterpunch.org/2010/03/19/secrets-of-the-tribe/&gt;.

[5] Il existe des textes très éclairants sur le site Concerned Anthropologists Blog et sur la nature du Human Terrain Systems de l’armée US qui emploie nombre d’anthropologues parce qu’ils sont capables d’étudier et d’analyser les cultures et les structures de pouvoir. Il semble que certains d’entre eux se soient rendus utiles au cours d’interrogatoires de prisonniers pour permettre d’établir un « rapport » entre celui qui interroge et son prisonnier. Apparemment, ils sont également sollicités pour leur connaissance du terrain dans le cadre de la sécurité intérieure. [NdT]

[6] Il me semble utile ici de préciser qu’avec les coupes budgétaires auxquelles sont soumises les universités, entre autres institutions dans lesquelles pourraient travailler ces chercheurs, certaines deviennent de véritables « viviers » pour ce secteur économique (l’armée). À tel point que les « Concerned Anthropologists » (les Anthropologues Inquiets) font signer des engagements à ne pas participer à ces travaux dans le cadre de l’Association des Anthropologues Américains. [NdT]

[7] M. Sahlins, Critique de la sociobiologie, aspects anthropologiques, 1976 ; éd. Gallimard, 1980.

[8] NdT : La Nature humaine : une illusion occidentale, 2008 ; éd. de l’Eclat, 2009, p. 46.

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