Gregory Chatonsky, Intelligence Artificielle et extinction, 2023

Contrairement à ce qu’affirment nombre de pétitions récentes signées par des chercheurs et des entrepreneurs, l’IA participe bien de l’extinction, mais pas du tout celle qui viendrait remplacer l’être humain par une technologie devenue, comme par miracle, autonome, et faisant précisément abstraction de ses dépendances logistiques, mais celle qui est en cours, qu’on la nomme anthropocène, capitalocène, ou autrement.
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Michel Gomez, Le miroir aux alouettes, 1992

« En se vulgarisant, l’écologie a perdu son sens scientifique pour en prendre un autre, magique, qui tire son prestige d’une connaissance ésotérique réservée à quelques magiciens. Ce n’est pas pour rien que cette étiquette a été collée sur la réaction contre la croissance à tout prix. Elle était trop complexe et inquiétante. Il fallait la simplifier, l’expliquer, la réintégrer dans la société qu’elle menace en l’apparentant à sa plus haute autorité : la science. […] Maintenant le mal est fait, il paraît difficile de refuser une dénomination passée dans le domaine public. »

Bernard Charbonneau, Le Feu vert, 1980.

[C’est pourtant à cette difficulté que Le miroir aux alouettes essayait de s’attaquer. Il n’y a maintenant plus de doute, il est politiquement primordial de séparer les deux sens du mot écologie, de les renommer : ils sont devenus ennemis l’un de l’autre.] Lire la suite »

The Land, L’humain monbiotique, 2022

Critique du dernier ouvrage de G. Monbiot

Introduction

George Monbiot,
Regenesis: Feeding the World Without Devouring the Planet,
Londres : Penguin Books, août 2022.

Traduction française :

Nourrir le monde – …sans dévorer la planète,
Paris, Les Liens qui Libèrent, octobre 2023.

 

Georges Monbiot est une grande figure de l’écologie britannique. Il est chroniqueur au journal The Guardian (l’équivalent du journal Le Monde en France), ce qui lui donne une grande influence sur l’opinion publique. Mais depuis quelques années, il s’est engagé dans la défense d’une écologie technocratique.

Déjà peu après l’accident nucléaire de Fukuhima, il avait signé une tribune où il se faisait le soutien de l’industrie nucléaire au prétexte que l’accident japonais n’avait pas fait des monceaux de cadavres bien visibles à la télévision et que le nucléaire est un moyen de produire de l’énergie « décarbonnée » qui permet de « lutter contre le réchauffement climatique » sans remettre en question la société capitaliste et industrielle [1].

Dans son dernier ouvrage, il propose de supprimer toute forme d’agriculture et d’élevage sur la planète, car ces activités quelque soit leur forme sont selon lui les principales causes du changement climatique. Les terres consacrées à l’agriculture et l’élevage seraient alors ré-ensauvagées. Les humains concentrés dans les villes se nourriraient alors de protéines produites par des bactéries dans des réacteurs bio-chimiques [2].

« Nous pouvons désormais penser la fin de l’agriculture, la force la plus destructrice jamais provoquée par l’homme. Nous pouvons envisager le début d’une ère nouvelle dans laquelle nous n’aurons plus besoin de sacrifier le monde vivant sur l’autel de nos appétits. Nous pouvons résoudre le principal dilemme qu’il nous a été donné d’affronter, nourrir le monde sans dévorer la planète. »

Ainsi, l’écologiste Monbiot se rallie à la « guerre contre la subsistance » que l’industrie capitaliste, dès ses débuts, a mené d’abord en Angleterre et continue encore à mener aujourd’hui à travers le monde afin de rendre chacun d’entre nous dépendant de ses marchandises, de ses ersatz… Lire la suite »

The Land, Monbiotic Man, 2022

George Monbiot,
Regenesis: Feeding the World Without Devouring the Planet,
Londres : Penguin Books, août 2022.

 

The ecologist Monbiot now supports the “war against subsistence” that capitalist industry has waged since its beginnings, first in England and still waging today throughout the world, in order to make each and every one of us dependent on its commodities, its ersatz products…

The plan to completely enclose humanity in an urban and industrial prison is now being expressed without restraint in certain business circles. In the near future, we can expect leaders?Lire la suite »

Arnaud Milanese, Le Rapport Meadows, 2023

ou les limites des Limites de la croissance

La publication du rapport Meadows en 1972 fait aujourd’hui figure de jalon dans l’histoire de la prise de conscience écologique. Victoire à la Pyrrhus, le document commandé par le Club de Rome apparaît pourtant un simple pot-pourri des éléments les plus consensuels de l’écologie de l’époque, réorientée vers une « écologie scientifique » à visée néo-impérialiste, et signe une défaite de l’écologie politique, celle de Bookchin et d’André Gorz.

Le rapport Meadows (Les limites de la croissance) a fêté cet automne ses 50 ans. Avec le temps, il s’est imposé comme le rapport de référence, amorçant une prise de conscience écologique à l’échelle mondiale [1]. Autour de lui, s’est construit un récit standard des 50 dernières années : à trente ans à peine, l’ingénieur du MIT, Dennis Meadows, entouré de Dana Meadows, Jorgen Randers et William Behrens, établit le lien entre le développement des activités économiques du monde industriel et une crise écologique dont nous ne pouvions alors qu’envisager les prémisses – la croissance, selon le titre du rapport, atteignait ses limites naturelles dans un monde fini. Lire la suite »