Geneviève Pruvost, Entretien avec Veronika Bennholdt-Thomsen, 2023

La perspective de la subsistance

Alors que l’écoféminisme connaît un regain en France depuis les années 2010-2020, il est resté centré sur un corpus principalement anglophone et n’est pas immédiatement rattaché aux études intersectionnelles et décoloniales. Or il existe un versant allemand du féminisme matérialiste des années 1970-1990 qui a pour singularité d’avoir placé le travail paysan, le travail domestique et l’appropriation du monde vivant au cœur des exploitations patriarcales. Lire la suite »

Veronika Bennholdt-Thomsen, Maria Mies : une écoféministe de la subsistance, 2023

Travaux des champs dans la ferme de ses parents, pédagogie alternative, découverte du féminisme en Inde, lutte contre la centrale nucléaire de Whyl (Allemagne), réflexion théorique sur le patriarcat capitaliste, dénonciation de la guerre planétaire menée contre la subsistance, programme de recherche mettant sur un pied d’égalité femmes du Sud et femmes du Nord, manifestations altermondialistes, création de la commission « femmes » d’ATTAC, retour à la vie villageoise : voici quelques-uns des engagements racontés par la sociologue et activiste écoféministe allemande Maria Mies dans son autobiographie intellectuelle [1]. Elle s’est éteinte le 15 mai 2023 à l’âge de 92 ans. Décoloniale et écologique avant l’heure [2], les partis pris de cette pionnière sont saisissants d’actualité. Lire la suite »

Bennholdt-Thomsen & Mies, Postmodernisme féministe, 1997

L’idéologie de l’oubli et de la dématérialisation

La tendance de certains groupes à oublier ou à « tuer » leurs origines n’est pas du tout un cas isolé et spécifique à l’Allemagne. La même chose s’est produite aux États-Unis et en Grande-Bretagne, pays d’où, sous la bannière du postmodernisme, cette tendance s’est répandue au monde entier. Le féminisme postmoderne est devenu le courant théorique dominant dans la plupart des départements universitaires d’études féministes, en particulier dans le monde anglo-saxon. Les chercheuses féministes qui ne suivent pas ce courant rencontrent beaucoup de difficultés pour trouver un poste dans un programme d’études féministes.Lire la suite »

Bennholdt-Thomsen & Mies, Feminist postmodernism, 1997

The ideology of oblivion and dematerialisation

The tendency of groups to forget or “kill” their origins is by no means an isolated case, specific to Germany. We find the same in the USA and in the UK, from where under the banner of postmodernism this tendency spread throughout the whole world. Postmodern feminism has become the dominant theoretical stream in most Women’s Studies departments, particularly in the Anglo-Saxon world. Feminist scholars who do not follow this stream experience problems in finding a position in Women’s Studies programmes.Lire la suite »

Bennholdt-Thomsen & Mies, Postmodernismus, 1997

die Ideologie des Vergessens und die Entmaterialisierung der Frau

Was wir in der deutschen Frauenbewegung über die Abkehr von den Anfängen beobachtet haben, ist keine Einzelerscheinung. Dieser Trend ist vor allem in den USA verbreitet, von wo er sich seit etwa 1980 unter dem Banner des postmodernen Feminismus als die neue theoretische Grundlage über die ganze Welt verbreitet hat.

Wie 1996 auf dem internationalen Frauenkongreß „Radical Feminist Politics“ in Melbourne berichtet wurde, ist der Postmodernismus inzwischen die herrschende Theorie an fast allen Frauenforschungs- und -studienschwerpunkten in der Welt, vor allem der angelsächsischen Welt. Frauen, die diese Theorie ablehnen, finden kaum mehr eine Stelle in den Women’s Studies. Lire la suite »

Joëlle Zask, La démocratie, une philosophie paysanne, 2016

Mettre en relation les paysans et l’essor des démocraties dans le monde, c’est donner du relief à diverses perplexités souvent occultées. C’est d’abord constater que les paysans ont été exclus de l’histoire, qui a progressivement mené à l’établissement des démocraties libérales et des pratiques qui s’inspirent des valeurs de liberté, d’égalité, d’individualité, d’indépendance, ou encore d’auto-gouvernement. Pourquoi ? Deuxièmement, c’est rechercher dans le fait même de cultiver la terre ce qui est aussi culture de soi et culture de la communauté, « civilisation ». Et c’est enfin affirmer que sans les paysans, sans leur face-à-face avec la terre cultivée et les solidarités qui s’en dégagent, l’écologie qui est aujourd’hui un programme urgent à réaliser, ne pourra pas être pleinement démocratique. Lire la suite »

Aurélien Berlan, La revalorisation écoféministe de la subsistance, 2021

Renouveler notre vision du monde

L’exploitation de la nature est liée à celle des femmes et des pays du Sud. La subsistance – ce que l’on fait pour entretenir la vie sans passer par l’industrie – doit être réhabilitée. Car s’il peut y avoir production de subsistance sans production marchande, l’inverse n’est pas vrai.

La Perspective de la subsistance est un manifeste écoféministe injustement méconnu, publié en 1997 par les Allemandes Veronika Bennholdt-Thomsen et Maria Mies [1]. Au terme d’une vingtaine d’années d’enquête, de réflexion et de discussion menées avec un large réseau de femmes du Nord et du Sud, elles proposent une autre manière de considérer l’économie, à rebours des libéraux et des marxistes prisonniers du dogme du développement et insensibles aux destructions qui l’accompagnent. Contre la vision qui disqualifie la production locale de subsistance (des biens destinés à satisfaire les besoins de ceux qui les produisent, afin d’assurer leur vie en toute autonomie) au profit de la production industrielle de marchandises (des biens standardisés destinés à alimenter un marché de masse), elles préconisent que la seconde soit subordonnée à la première, afin que la vie vaille plus que l’argent. Lire la suite »

Matthieu Amiech, Lettre ouverte aux organisatrices du rassemblement estival Les Résistantes, 2023

au(x) Réseau(x) de ravitaillement des luttes
et aux comités locaux
des Soulèvements de la Terre

L’envie d’écrire ce texte m’est venue au retour du rassemblement des luttes écologistes et de défense des territoires, du 3 au 6 août dernier sur le plateau du Larzac, en lisière de l’autoroute A75. Je suis rentré de ce rassemblement animé de sentiments contradictoires : à la fois surexcité et frustré, rempli de l’énergie donnée par toutes les rencontres qui ont lieu dans un tel moment, et en même temps gêné de ce qui y manque. Conscient qu’une telle initiative est précieuse et traduit le fait que la société où nous vivons n’est pas encore écrasée par l’État et le capitalisme, qu’elle présente des réserves admirables d’auto-organisation et de solidarités ; mais aussi frappé par l’homogénéité sociale des participants, par la présence diffuse d’une écologie – dépolitisée – du bien-être en contrepoint des discussions visant à raconter et faire grandir les luttes. Enfin, j’ai été frappé par la persistance de l’emprise numérique sur le milieu social et politique qui se trouvait réuni à cette occasion. Lire la suite »

Radio: Bennholdt-Thomsen & Pruvost, La Politique de la Subsistance, 2023

Veronika Bennholdt-Thomsen et Geneviève Pruvost présentent l’ouvrage La Subsistance : une perspective écoféministe (éd. La Lenteur, octobre 2022).

Une tendance singulière et importante de l’écoféminisme : la perspective de la subsistance. Travail de (re-)production de la vie, domaine des tâches quotidiennes, invisibles, réalisés majoritairement par des femmes, la subsistance a pourtant été ignorée voire méprisée dans le féminisme comme dans l’écologie, et n’a que momentanément été remise au centre de l’attention par la crise sanitaire. La catastrophe écologique exige pourtant de repenser complètement nos manières de vivre et de travailler.

Conférences organisées par l’Atelier d’écologie politique (Atecopol) de Toulouse en avril 2023.

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Racine de moins un
Une émission
de critique des sciences, des technologies
et de la société industrielle.

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Émission Racine de Moins Un n°87,
diffusée sur Radio Zinzine en septembre 2023. Lire la suite »