De si savants prolétaires
« Nous avons été témoin du dépérissement des hommes de la science […] la plupart de ceux qui par le temps actuel ont l’air de savants, déguisent la vérité par le mensonge, ne dépassent pas les limites de l’imposture et de l’ostentation savante et ne font servir la quantité de savoir qu’ils possèdent qu’à des buts matériels et vils. »
Omar Khayam (1050-1123)
La recherche moderne dispose d’outils si puissants que les forces qu’elle met en œuvre concurrencent ouvertement celles de la nature. Comme l’écrivait Günther Anders [1], son laboratoire est maintenant coextensif au globe, son champ d’expérience est la planète elle-même. Il est possible, donc courant, de bouleverser l’environnement matériel, psychologique et social des hommes. Une telle puissance impose la prise de conscience des conditions matérielles et psychologiques dans lesquelles la science se fait si elle ne veut pas sombrer dans le délire paranoïaque et autistique de la fausse conscience. À travers l’expérience vécue des pratiques de recherche dans les laboratoires de biologie, nous essaierons de montrer l’environnement aliénant dans lequel la recherche est menée ainsi que les aberrations qui entachent la diffusion de ses produits en direction d’un public dont on n’attend plus que l’adhésion vaguement résignée qu’il témoigne à toute chose, persuadé d’être dépourvu de tout titre à refuser sa confiance aux experts. Qu’un malheur survienne [2], ce sera la faute à pas d’chance ! Lire la suite »